Variant de signification inconnu : à rendre ou à laisser ?
Nicolas SAHAKIAN, Marseille
Dr. Pauline Romanet, Marseille
Dr. Anne Jouinot, Paris
Conséquence d’une meilleure connaissance physiopathologique et de l’amélioration des techniques d’analyses, la réalisation d’explorations génétiques est de plus en plus fréquemment pratiquée en routine dans le cadre des maladies rares endocriniennes. L’augmentation du nombre d’examens conduit inévitablement à l’augmentation du nombre de variants de signification inconnue (VUS) mis en évidence, posant ainsi la problématique du conseil génétique.
L’analyse d’un variant découvert lors de l’examen génétique se fonde sur les critères ACMG (American College of Medical Genetics) de 2015. Sur la base de 27 critères répartis en 8 catégories, elle permet de classer les variants en fonction de leur pertinence clinique. Cette classification tient compte notamment de la nature de la variation génétique, de sa localisation génomique et de son association connue ou non avec le phénotype, sa survenue de novo ou non, des données bibliographiques, des connaissances physiopathologiques et des bases de données populationnelles comme GnomAD, ainsi que des bases de données cliniques comme ClinVar ou UMD. Les analyses fonctionnelles (comme l’expression protéique ou le séquençage de l’ARN) jouent également un rôle clé dans l’interprétation des variants.
Un variant peut être classé comme pathogène (VP) ou probablement pathogène (VPP). Il peut s’agir d’un variant entrainant une perte de fonction ou une absence de protéine dans le cadre d’un gène suppresseur de tumeurs, ou de gain de fonction dans le cas d’un oncogène. Ces variants ont une conséquence clinique et sont dit informatifs. Ils doivent apparaitre sur le compte rendu de l’analyse génétique, permettent le diagnostic génétique de maladie rare pour le patient analysé et le dépistage génétique pour ses apparentés. Ils peuvent également être utiles pour le pronostic et la thérapeutique. Enfin, un VP/VPP peut être utilisé, dans certaines indications, dans le cadre du diagnostic prénatal et du diagnostic préimplantatoire.
Un variant peut être classé comme bénin (VB) ou probablement bénin (VPB), et est alors dit sans conséquence clinique. Ces variants n’apparaissent pas de le compte rendu d’analyse et écartent pour le patient analysé le diagnostic pour le gène testé. Toutefois, devant un diagnostic clinique évident, un test génétique initial négatif devra faire discuter de la réalisation d’analyses de deuxième ligne. Il sera alors souhaitable de procéder à la surveillance clinique des apparentés, le conseil génétique n’étant pas possible en l’absence de cible moléculaire identifiée.
Enfin, un variant peut être classé comme étant de signification inconnu (VSI), en raison de données insuffisantes ou contradictoires. Un tel variant a une conséquence clinique inconnu. Il peut être mentionné dans le compte rendu d’analyse mais ne peut servir de critère diagnostique ni être utilisé au titre du dépistage familial. Afin d’avoir une utilité clinique, plusieurs explorations peuvent être réalisées pour reclasser un VSI. L’analyse de coségrégation familiale, possible uniquement chez les apparentés majeurs, permet d’évaluer une éventuelle corrélation génotype – phénotype. Elle est surtout rentable dans les pathologies à forte pénétrance. Des analyses complémentaires tumorales et fonctionnelles peuvent également permettre d’apprécier le caractère pathogène ou non d’un variant. Enfin, la génétique évolue dans le temps et un VSI n’est pas voué à la rester. En effet, ces variants sont régulièrement rediscutés dans le cadre du réseau TENGEN afin d’être reclassés au mieux.